
LE SIÈGE DE MONTARGIS, DÉBUT JUILLET AU 5 SEPTEMBRE 1427
Jean de Dunois, le bâtard d’Orléans
Le contexte
Les affaires de la France allaient tristement en cette année 1427. Les Anglais, chaque jour, s’avançaient dans le cœur du royaume de France. Tout le cours de la Seine leur appartenait, et ils occupaient plusieurs points sur la Loire. L’importance de la position de Montargis s’accroissait de la force de son château qui pouvait contenir une garnison nombreuse. Il devenait important de ne pas laisser un tel point stratégique aux mains des troupes du roi de Bourges. Encore quelques succès des Anglais, et Charles VII aurait été rejeté de l’autre côté du fleuve. Cet acte, pourtant, héroïque de ses habitants resta longtemps dans l’oubli. Leur victoire sur l’ennemi anglais déstabilisa le dauphin Charles qui hésitait à affronter la triple alliance du traité d’Amiens. Cet évènement déclencha chez lui la volonté de changer les choses, avec l’aide de son nouvel allié, le duc de Bretagne. La « Reconquête » de la France était en marche.
La localisation
Les forces en présence
Amies : Le royaume de France avec 10 000 hommes et la garnison
Ennemies : Le royaume d’Angleterre avec 6 000 hommes
Les pertes
Amies : inconnues
Ennemies : beaucoup de morts par les tirs des canons de Montargis
Le siège
Les Anglais, qui veulent occuper toute la Loire, décident de jeter leur dévolu sur la place-forte de Montargis du roi de Bourges. En effet, ils désirent en faire un grand quartier général qui surveillerait toute la Loire. Jean de Lancastre, Ier duc de Bedford et régent du royaume de France pour le roi d’Angleterre, envoie six mille hommes commandés par des chefs aguerris comme Richard de Beauchamp, 13e comte de Warwick, William de la Pole, 1er duc de Suffolk et son frère, les premiers jours de juillet 1427. De leur côté, avec la reprise de la guerre entre Anglais et Français, le maire et son conseil ordonnent, dès 1418, à la suite du passage du roi Charles VI, de renforcer les remparts de la ville. À l’approche des Anglais, le gouverneur, Bouzon de la Faille, gentilhomme gascon, homme de bravoure et de ressources, conforte la surveillance des remparts par une forte milice, et place des bombardes et des pierriers de tous les côtés. Il jure devant les habitants de ne rien céder à l’ennemi. Pour investir la ville, Warwick établit son quartier général au couvent des Dominicaines, gardant la route de la Bourgogne ; Suffolk campe à peu près à la même place que l’hôtel de ville actuel et de la Pole au Sud-ouest du château. Plusieurs assauts répétés sont vains. Montargis résiste par des tirs de canons qui causent des pertes dans les rangs ennemis. Le siège en est à son deuxième mois. Les Anglais sont bien approvisionnés, mais les assiégés commencent à manquer de tout. Tous les méandres du Loing, rivière qui passe près de la forteresse, sont contrôlés par les Anglais. Plus aucun ravitaillement ne passe. Tous les messagers, envoyés à Bourges par le gouverneur pour demander de l’aide au dauphin, sont arrêtés et jetés en prison. Néanmoins, la lutte est toujours aussi acharnée. Un jour, pendant le siège, un messager de la ville emprisonné et corrompu, propose aux Anglais d’entrer en ville, sans coup férir, grâce à son frère, gardien de la porte principale. Fatigué des assauts aux murailles sans résultats, Warwick accepte la proposition. Mais, le gouverneur de la ville, mis au courant du stratagème, prend des dispositions pour empêcher cette incursion ennemie. Au milieu de la nuit, Simon Morhier, prévôt de Paris pour le roi d’Angleterre, et quelques hommes montent à l’échelle après un signal lumineux des remparts. Au fur et à mesure qu’ils grimpent, arrivés en haut, ils sont capturés sans brutalité. Quand tous sont faits prisonniers, les assiégés se mettent à rire à tue-tête et ridiculisent les Anglais qui attendent, armés, pour entrer dans la ville. Cependant, mourant de faim, sans munitions et sans bois pour faire chauffer les quelques vivres qui leur restent, les assiégés désespèrent de voir venir les renforts. Leur moral est au plus bas. Charles est mis au courant de la résistance des Montargis face aux Anglais qui les assiègent. Aussitôt, il dépêche le connétable de France, Arthur de Richemont, avec ses troupes et un convoi de ravitaillement. Aidé de ses capitaines, La Hire
, Poton de Xaintrailles, Jean de Dunois
et bien d’autres, le connétable avec mille cinq cents lances et de nombreux piétons prennent la direction de Mehun, traversent la Loire à Gien et arrivent en vue de Montargis. Le 2 septembre 1427, après un bref repos, La Hire, en avant-garde, repère les emplacements de ses ennemis. Puis, il fond sur eux avec une extrême vigueur. Il est midi et la chaleur est accablante. Aucun Anglais ne s’attend à une attaque surtout après une nuit complète de garde. La surprise est à son comble. Le désordre règne maintenant dans les rangs. Les assiégeants, voyant les renforts français, sortent de la ville et chargent leur ennemi par l’arrière. Pris entre deux feux, les Anglais fuient tous ensemble par le pont qui enjambe le Loing. Mais, celui-ci s’effondre à leur passage et beaucoup se noient, car les paysans avaient construit un barrage en aval de la ville pour faire grossir la rivière et auraient scié les pieds du pont pour le fragiliser d’après certains chroniqueurs. Jean de Dunois, qui conduisait des centaines de chariots de ravitaillement pour sauver Montargis, entre dans la ville en vainqueur. Warwick, Suffolk et de La Pole, avec le reste de leur armée, se retirent, passent par Nemours et rejoignent Paris. Plusieurs faits héroïques de citoyens de Montargis ont permis la victoire de l’armée française, dont celui de Gaillardin. Pendant la bataille, il s’empara de l’étendard de Warwick qu’il portera pendant plusieurs années lors des cérémonies fêtant la victoire.
Les conséquences
Le siège de Montargis, en 1427, fut l’un des évènements les plus importants de l’histoire du Gâtinais. La levée de ce siège fut le premier fait d’armes de Dunois, le bâtard d’Orléans. Ce fut, aussi, le premier revers des Anglais, jusqu’à présent, toujours triomphants. Cette bonne nouvelle traversa la France après les défaites cuisantes de Verneuil-sur-Avre en 1424 et Cravant en 1423. Charles, le dauphin, combla de grâces et de privilèges la ville pour cette victoire. Il autorisa la ville à s’appeler Montargis-le-Franc et à porter sur leurs armoiries trois fleurs de lys d’or, avec les lettres M (Montargis) en haut, L.F. en pointe (Le Franc). Ces privilèges furent conservés et successivement augmentés par Louis XI, Charles VIII, Louis XII et les rois suivants, et ce, jusqu’à Louis XVI en 1784.