LA RENCONTRE ENTRE LE COMTE DE RICHEMONT ET JEANNE D’ARC LE 16 JUIN 1429

LA RENCONTRE ENTRE LE COMTE DE RICHEMONT ET JEANNE D’ARC LE 16 JUIN 1429

Il est vrai que la guerre de Cent Ans ne s’arrête pas à Charles V et Bertrand du Guesclin, les deux personnages principaux de mon blog. Nous avons, aussi, Philippe VI de Valois, Jean II le bon, Charles VI et Charles VII.

Cet été, lors de mes vacances, j’ai visité Locronan, l’un des plus beaux villages du Finistère. D’ailleurs, vous avez dû voir ma publication dans Facebook. Comme à mon habitude, je rentre dans l’église. Ma curiosité s’est arrêtée sur un vitrail. Jeanne d’Arc, en discussion, avec un des nobles de Bretagne. Je fais mes recherches et je découvre un évènement dont je ne connaissais pas l’histoire. L’entrevue entre Arthur III de Bretagne, comte de Richemont et Jeanne d’Arc, le 16 juin 1429 près de Beaugency, sur la Loire, non loin d’Orléans.

 

Le comte de Richemont, frère de Jean V de Bretagne, ne sera duc de Bretagne qu’un an et trois mois en septembre 1457 jusqu’à sa mort. Il rejoint avec des troupes bretonnes le camp des Armagnacs de Charles VII. Aux côtés des Français, il est fait prisonnier par les Anglais à Azincourt en 1415. Toujours captif, il assiste à l’entrée, dans Paris, de Henri V, roi d’Angleterre et à la prise de Meaux en 1422. Finalement, il recouvre sa liberté à la mort du roi d’Angleterre. La défaite de Verneuil-sur-Avre, en 1424, laisse vacant le poste de connétable de France après la mort de Jean Stuart. Charles VII le nomme connétable de France malgré la réticence de ses ennemis dont Georges de la Trémoille, grand chambellan de France, et Yolande d’Aragon, belle-mère de Charles VII. Disgracié en raison de ses échecs militaires et politiques, il retourne en Bretagne auprès de son frère qui négocie une alliance avec les Anglais en juillet 1427. Fraîchement débarqués en France, ils s’emparent de Laval et du Mans. Les troupes de Thomas Montagu, comte de Salisbury, s’avancent vers Orléans. Charles VII refuse toujours le retour en grâce de son connétable sur le conseil de Georges de la Trémoille, son fervent adversaire. L’envoi de secours à Orléans décide Richemont à passer outre l’interdiction de combattre aux côtés des Français de Charles VII. Il recrute des troupes bretonnes et poitevines et avance vers Orléans.

Charles VII envoie un héraut, le sire de la Jaille, auprès du comte, en marche, et lui ordonne ceci.

Retournez en arrière ou le roi vous combattra !

Héraut ! Allez expliquer au roi, ce que je fais, est pour le bien de l’état ! Je verrai qui voudra me combattre.

Il traverse la Vienne à gué et arrive à Amboise. Le comte de Richemont apprend qu’il est inutile d’aller à Orléans, car le siège de la ville a été levé par Jeanne d’Arc. On lui dit, aussi, que Jargeau est tombée et que le comte de Suffolk a été fait prisonnier par cette bergère, Jeanne la Pucelle. Maintenant, elle marche sur Beaugency. Il décide de changer de route et d’aller à sa rencontre. Le comte de Richemont n’est pas seul, il est accompagné de chevaliers et d’écuyers comme le comte de Pardiac, les seigneurs de Beaumanoir, de Rostrenen et de Dinan ainsi que le sire Robert de Montauban. Le comte de Richemont a levé une armée de 400 lances et 800 archers. Son approche sème le trouble dans les rangs français.

Jeanne d’Arc, accompagnée du duc d’Alençon, veut obéir aux ordres du roi et refuse l’aide du comte de Richemont. D’autres comme la Hire, Girault de la Pallière et le sire de Guitry disent.

Il serait insensé de refuser un secours dont on aurait si grand besoin, au moment où Talbot et Fastolf s’avancent avec 5 000 hommes, venus de Paris. D’autre part, ne serait-il pas mieux de laisser le commandement de l’armée au connétable, si on l’admettait dans nos rangs ?

Le duc d’Alençon qui commande cette armée, entendant les propos de ces chevaliers, rétorque assez justement et sèchement.

Si vous souhaitez recevoir le connétable, je quitte immédiatement les lieux.

De la parole à l’exécution, le duc, certains capitaines et Jeanne d’Arc enfourchent leur destrier prêt à partir quand l’un d’eux interpelle Jeanne d’Arc.

Jeanne ! Que faites-vous, là ?

Messires, j’obéis au roi donc, je combattrai le comte de Richemont.

Jeanne ! Si vous y allez, vous trouverez à qui parler, car il y en a plus, dans sa compagnie, pour lui que pour vous et toutes les pucelles du royaume de France.

À cela, Jeanne d’Arc réfléchit : « Faut-il sacrifier aux rancunes de la Trémoille, les intérêts du pays ? » Elle décide d’infléchir le duc d’Alençon. Après discussion, ils marchent sur Richemont. Les deux armées s’arrêtent devant la maladrerie de Beaugency. Jeanne descend de cheval devant le connétable qui en fait autant. Il dit.

Jeanne, on m’a dit que vous vouliez me combattre. Je ne sais si vous êtes de Dieu ou du diable. Si vous êtes de Dieu, je ne vous crains en rien, car Il connaît ma volonté. Si vous êtes du diable, je vous crains encore moins. Sachez que je n’ai d’autres intentions que de servir le roi de France, loyalement. Je suis victime de rapports perfides, et je sais de qui viennent ces fourberies.

Jeanne reçoit le serment de fidélité de ce rude et fier Breton qui, d’ordinaire, ne faiblit devant personne. Là, il se plie pour avoir la permission de combattre, même, comme simple capitaine. Il se sent humilié devant son ennemi juré, de la Trémoille.

Pendant ce temps, les Anglais évacuent la ville pour défendre le pont et le château de Beaugency. Ils sont canonnés sans interruption par l’artillerie française. Le comte de Richemont, connétable de France, n’aura pas de logement. On décide qu’il fasse le guet toute la nuit, soin qui incombait, selon l’usage, aux nouveaux venus. Il y consentit et dit à son biographe.

Ce fut le plus beau guet qui eut été fait en France depuis longtemps.

Source: Le connétable de Richemont, Arthur de Bretagne, 1393-1458 – Page 470 Eugène Cosneau · 1886

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