DU GUESCLIN : 1364 LES PRISES DE MANTES ET MEULAN
Les rapports entre la France, l’Angleterre, la Bretagne et la Navarre sont toujours aussi ambigus pendant l’hiver 1363-1364. Par tous les traités (Brétigny en 1360, Pontoise en 1359 ou La Lande d’Evran en 1363) en cours, la paix est toute relative. Chacun attend une erreur de l’autre pour reprendre la guerre. Il y en a un qui intrigue plus que les autres : Charles Le Mauvais, roi de Navarre. Il veut toujours faire payer ses humiliations au roi de France. Au printemps 1364, la reprise de la guerre vient par lui.
Charles de Navarre a un puissant voisin et allié: Le Prince Noir. Celui-ci ne peut déclarer ouvertement la guerre aux français car le traité de paix de Brétigny l’en empêche. Mais il peut venir en aide au navarrais. Ce qu’il fait. La Normandie est en proie aux ravages des anglo-navarrais et aux prises de places fortes. Charles le Régent n’a plus que jamais besoin de Bertrand Du Guesclin.
Février 1364, il reprend avec son cousin Olivier de Mauny des châteaux aux navarrais. Et pourtant il en fallut de peu pour que le siège de Rolleboise, au sud de Mantes, avorta. En effet, les soldats n’ont pas été payés. Les caisses de l’État sont vides. Du Guesclin dit au régent :
« – Il faut payer les soldes, Sire, sinon je ne pourrais retenir plus longtemps mes hommes. Ces chaperons fourrés (les clercs, les bureaucrates et les bourgeois ) doivent payer pour éviter les pillages. »
Ainsi fait, on marche vers Rolleboise et on commence le siège du château. Le Maréchal Boucicaut apporte un message du régent à Du Guesclin lui ordonnant de cesser le siège de Rolleboise et d’aller immédiatement occuper Mantes et Meulan. Les troupes navarraises, remontant vers le Nord, veulent récupérer les fiefs de Charles le Mauvais confisqués par Charles le Régent pour conspiration contre le roi. A leur tête marche Jean de Grailly, le Captal de Buch, très expérimenté chef de guerre.
Mantes est aux mains de navarrais. Du Guesclin décide d’utiliser la même ruse que la prise du château de Fougeray. Une dizaines de bretons, cachant leurs armes sous des longs manteaux, s’approchent du pont levis. Les gardes le baissent pour laisser passer un chariot. Ils sortent leurs épées et bondissent. Ils tuent les sentinelles. Du Guesclin s’écria : « Saint Yves, Guesclin ! À mort tous navarrais ». Avec une centaine d’hommes, il pénètre dans la garnison. Ils tuent les soldats ou les mettent en fuite. Puis, ils s’emparent de la forteresse. N’ayant pas reçu la solde du Régent, Du Guesclin laisse ses hommes pillés et tués les bourgeois et amis des navarrais. Du Guesclin défend les paysans et hait les bourgeois.
Le cas de Mantes est réglé. Il laisse la garde de la ville à deux de ses fidèles : Hugues de Châlon et Even Charruel. Maintenant, il reste celui de Meulan. La ruse n’est plus possible. Les bourgeois ont été prévenus du siège de Mantes. Il faut donner l’assaut. La ville tient bon. Mais Du Guesclin fait attaquer la ville par les deux rives de la Seine. Impossible de tenir les remparts, les villageois se réfugient dans le château. Du Guesclin en hurlant « Montjoie ! Saint Yves ! Guesclin, en avant » Ses hommes envahissent la ville, la pillent et tuent les bourgeois et amis des navarrais. Le château résiste, surtout le donjon. Il est construit avec des murs très épais et est haut de 30 mètres. Il est imprenable par les échelles. Du Guesclin décide d’utiliser la sape pour ébranler les fondations. Ils creusent des galeries sans être vu des assiégés. Tout est prêt.
Les sapeurs le préviennent :
«- Seigneur, quand vous voudrez, nous pourrons faire tomber cette tour.
– Eh bien, voilà qui me fait plaisir ; Puisque cela dedans ne veulent obéir, il est normal qu’on les fasse mourir. »
Le feu est mis. Le plafond de la galerie cède. La moitié de la tour s’effondre. Beaucoup meurent dans les décombres. Le reste des assiégés est fait prisonnier. Ils sont envoyés à Paris où ils seront exécutés. Désormais, le sud de la vallée de Seine est à peu près dégagé. Charles le Régent a assisté à la scène.
Mais le danger vient maintenant de Vernon. Le dauphin emmène Bertrand Du Guesclin en son château du Goulay. Arrivé sur place, il apprend que son père est mort le 08 août 1364 à Londres.
A 27 ans, Charles le dauphin devient roi de France sous le nom Charles V. Maintenant le destin de Bertrand est lié au roi. Ils seront inséparables jusqu’à la mort de Du Guesclin en 1380. Charles V mourra 6 mois plus tard. L’histoire les a juste titre associés, faisant d’eux l’un des couples célèbres à l’instar de Dagobert – St Éloi, Henry IV – Sully, ou Louis XIII – Richelieu.