LE SIÈGE DE DIEPPE, NOVEMBRE 1442 – AOUT 1443

LE SIÈGE DE DIEPPE, NOVEMBRE 1442 – AOUT 1443

 

 

Ce siège pourrait apparaître comme une simple histoire militaire. Il n’y a eu aucun assaut majeur de la ville. Pourtant la défaite des Anglais devant Dieppe sonne le glas de la Normandie des Lancastre. En revanche, elle conforte l’entrée du dauphin Louis, futur roi Louis XI, en quête de réhabilitation depuis sa participation, avec la haute noblesse, à la Praguerie vers 1440 contre son père.

C’est à partir de 1337 que le port de Dieppe devient une redoutable base militaire contre l’Angleterre. Les pirates français, ou à leur solde, arraisonnent les navires marchands anglais. En 1340, Dieppe fournit des navires de guerre, vingt et une nefs, à Philippe VI de Valois pour la bataille de L’Écluse en 1340, dure défaite française. Par peur d’être envahie par les Anglais, Dieppe renforce ses défenses.

Une muraille est érigée face à la mer, flanquée de deux tours de garde. Puis, on construit un donjon pour protéger l’entrée du port et une puissante porte, coté des terres. D’abord, Anglaise en 1420, les Français du Pays de Caux s’emparent de la ville en 1435 avec à leur tête, l’ancien capitaine de Dieppe, Charles des Marets avec l’aide de Jean III de Rieux, comte de Ancenis. Cette perte anglaise fut fortement dommageable, car le port est un point stratégique sur la côte normande.

 

Après les pertes d’Évreux et de Louviers, John Talbot, comte de Shrewsbury et capitaine lancastrien, parti de Caudebec-en-Caux, se replie et mène le siège le 2 novembre 1442 devant Dieppe, la sortie nécessaire vers la mer, pour les Anglais de la place forte d’Arques, (en Seine Maritime, renommée Arques-la-Bataille afin d’éviter la confusion avec Arques dans le Pas-de-Calais) et le dernier port normand tenu par les Anglais. Sachant qu’il y trouverait une forte résistance et qu’il n’avait pas assez de force pour l’assiéger, il fait bâtir sur la falaise une grande bastille en bois, face à la ville, y place deux cents canons et une grande quantité de bombardes, creuse de larges fossés et la fortifie par des palissades. Conscient qu’il n’aura pas assez d’hommes et de vivres pour donner l’assaut, il retourne en Angleterre demander assistance auprès du roi. Profitant de son absence, les Dieppois appellent le roi de France à l’aide. Il leur envoie cent lances commandées par le sieur de Ricarville, gentilhomme du Pays de Caux. Mais, cela ne suffira pas contre une armée anglaise qui sera, bientôt, plus forte. Par chance, le dauphin Louis cherche une occasion pour se racheter auprès de son père et veut faire ses premières armes. Il lui demande d’aller à Dieppe avec une armée pour en chasser les Anglais. Charles VII accepte et le nomme lieutenant-général pour le pays entre la Somme et la Seine. Les comtes de Dunois et de Saint-Pol, les sires de Gaucourt, de Châtillon et plusieurs capitaines expérimentés l’accompagnent.

Louis XI

Après une marche rapide, le dauphin arrive, à Abbeville, les premiers jours d’août 1443. De 1 600 hommes, son armée grossit à 3 000 avec les Picards. Il part aussitôt pour Dieppe et y entre le 10 août. On lui apprend que les Anglais attendent de gros renforts imminents, par la mer, commandés par le duc de Somerset. Sans attendre, le dauphin quitte la ville, traverse le ruisseau, l’Arques, à marée basse, vient se poster devant la bastille avec six cents de ses meilleurs soldats. Encerclés, les Anglais tentent deux sorties sans résultat malgré le manque de protection collective des Français. Le lendemain, le dauphin fait construire six ponts de bois roulants pour passer sur les fossés. Deux jours plus tard, il fait sonner les trompettes. Les ponts roulants sont poussés au pied des remparts en bois. On pose les échelles aux six endroits et les Français grimpent. Les assiégés leur jettent des pierres et tirent de nombreux traits. Une centaine d’hommes meurent en montant. Les échelles sont renversées et l’assaut, abandonné. Le dauphin ne se laisse pas envahir par la fatalité. Il prend une échelle, s’élance sur le pont et grimpe à la muraille. L’armée se ressaisit voyant le dauphin avancé seul vers l’ennemi. Soldats et capitaines courent à son secours. On redonne l’assaut à la bastille. Les assiégés étourdis cèdent. La bastille est envahie. Cinq cents Anglais sont passés au fil de l’épée. Le reste se rend.

Cette prise de Dieppe fait grand bruit en France et grand honneur au dauphin. La bastille est prise et complètement rasée sur son ordre. Nous sommes le 15 août 1443. Il rretourne dans Dieppe, entre dans l’église Saint-Jacques et rend grâces à Dieu. Il fait fabriquer une statue, en pur argent, de la Sainte-Vierge et l’offre à l’église. Délivrés de neuf mois de siège, les Dieppois consacreront leur ville à son culte. Ils fonderont la confrérie dite de « la mi-août ». Dieppe retrouve sa splendeur après trente années d’occupation anglaise de misère.

Sources :

Les Monuments de la Monarchie Française, qui comprennent …Montfaucon · 1731

– Histoire de Dieppe – Volume 20 Louis Vitet · 1844

 

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