LA BATAILLE D’ANTHON EN 1430

LA BATAILLE D’ANTHON EN 1430

Pendant que le duc Philippe III de Bourgogne augmentait sa puissance dans le nord, en Flandre, le sud de son duché était en peine. En effet, profitant de l’attention des Français sur le repli continu des Anglais dans le royaume de France, Louis II de Chalon-d’Arlay, prince d’Orange, avec les troupes de son allié, Amédée VIII, duc de Savoie, ennemi des Dauphins de France, ambitionnait de s’emparer du Dauphiné. Sa prétention d’expansion s’arrêta brutalement à la bataille d’Anthon le 11 juin 1430.

Le sire Raoul de Gaucourt, ayant vaillamment défendu Orléans aux côtés de Jeanne d’Arc, est nommé par le roi de France, gouverneur du Dauphiné, sans argent et sans troupe. Il apprend que le prince d’Orange lève une forte armée venant de Bourgogne et de Savoie contre lui. Il décide de défendre ce territoire coûte que coûte. Il s’accorde avec le sire Imbert de Grollée, bailli du Lyonnais et maréchal du Dauphiné, qui lui fournit trois cents chevaux du Lyonnais et du Mâconnais. Il demande l’aide de Charles Ier, duc de Bourbon et comte de Clermont, qui lui donne des hommes du Beaujolais et de la Dombes. Cela ne suffira pas devant les troupes du prince d’Orange. Il manque un chef de guerre. Tous les deux partent à la recherche d’un capitaine aguerri. Il trouve, sur conseil du roi de France, un capitaine mercenaire espagnol nommé Rodrigue de Villandrando, surnommé « l’empereur des brigands ou l’écorcheur » ; il est comte de Valladolid en Espagne et seigneur d’Ussel d’Allier en France ;

il désole la région du Puy-de-Dôme, du Velay et du Vivarais avec ses mercenaires. En accord avec le roi de France, le 26 mars 1430, il rejoint la coalition contre le prince d’Orange, avec ses trois cents hommes et son fidèle lieutenant Jean de Salazar. Au conseil du Dauphiné, on vote un budget de 50 000 florins pour frais de guerre. Le 9 juin, avant l’arrivée du prince d’Orange, Villandrando et son lieutenant s’emparent des forteresses « orangistes » de Auberives, de Colombier et de Pusignan. Le prince est surpris de tant d’audace et décide de venir en aide aux assiégés de la forteresse, mais il ne sait pas qu’elle s’est rendue. Gaucourt, le sénéchal du Dauphiné et Villandrando marchent sur Anthon à la rencontre du prince d’Orange. Gaucourt sait qu’il ne doit pas la perdre la bataille, car le Lyonnais, le Dauphiné et le Languedoc tomberaient dans ses mains. Le roi de France perdrait ainsi son royaume. Il réunit son conseil de guerre pour organiser la bataille. Villandrando demande à prendre l’avant-garde. Il dit au sire de Gaucourt.

Sire ! Faites-moi cet honneur, et avec l’aide de Dieu, je me comporterai si bien que vous serez content de moi.

Allons ! Dieu nous aidera ; ne soyons pas ébahis, ils sont plus que nous ; si vous vous battez hardiment, vous ferez grand butin et vous serez riche à vie.

Le prince d’Orange néglige cette petite armée en comparaison à la sienne. En effet, le duc de Savoie lui fournit trois cents lances et deux mille fantassins encadrés par la noblesse genevoise et du pays de Bresse. Il est entouré de capitaines bourguignons les plus renommés comme Toulongeon, maréchal de bourgogne, Jean Ier de Neufchâtel-Montaigu, Thibaud de Rougemont et bien d’autres. François de Neuchâtel, comte de Fribourg, lui apporte ses Suisses.

    Le prince d’Orange arrive près d’Anthon, non loin du confluent de l’Ain et du Rhône, dans la nuit du 10 juin 1430. au petit matin, il est surpris quand il apprend que Villandrando, le redoutable capitaine mercenaire espagnol, est à la tête de cette petite armée. Il commence à déchanter, car la victoire facile n’est plus de mise.

Les éclaireurs de Gaucourt lui apprennent que l’ennemi arrive d’Anthon, à leur rencontre, en traversant le bois des Franchises. Villandrando prend sa compagnie, quitte le corps de bataille, le contourne et se poste à l’orée. Puis, il donne l’assaut pour feinter l’ennemi. Aussitôt, l’avant-garde du prince est assaillie. Surpris par cette attaque, les Bourguignons reculent et sont refoulés dans la plaine. Le corps de bataille de Gaucourt fond alors sur eux. L’engagement est rude. C’est un massacre. Suisses, Bourguignons et Savoyards fuient dans tous les sens. 500 hommes dont des nobles sont faits prisonniers. On recense 460 morts sur le terrain et 200 qui se noie dans le Rhône. Le prince d’Orange combat si farouchement qu’il est blessé dans la mêlée. Voyant son armée défaite, il quitte le champ de bataille. Bien armé, il se jette à cheval dans le Rhône et le traverse. Cette défaite porte un coup fatal à l’expansion de la Bourgogne vers le sud. Nous sommes le 11 juin 1430.

Rouge de colère, pour une victoire qui devait être assurée, le duc Philippe ôta le collier de la Toison-d’Or au sire de Montaigu qui s’était enfui le premier et fut dégradé. Quant au prince d’Orange, on écrit qu’il embrassa sur la bouche son cheval qui venait de le sauver. Gaucourt, ayant saisi la bannière du prince défait la fit suspendre aux voûtes de la chapelle que les Dauphins possédaient dans la cathédrale de Grenoble. Il fut nommé premier chambellan du roi de France, Grôlée conseiller et chambellan et Villandrando reçut la forteresse de Pusignan.

Source : Souvenirs du règne d’Amédée VIII., premier duc de Savoie. …Louis Marie Pantaléon COSTA (marquis de Beauregard.) · 1859

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