BERTRAND DU GUESCLIN ET LES FEMMES

BERTRAND DU GUESCLIN ET LES FEMMES

Dés sa naissance, il est rejeté par ses parents qui le souhaitaient « mort ou noyé » d’après Froissart. En effet, il est laid. Et pourtant, il se maria deux fois et eut deux maîtresses une, connue en Castille et une, par supposition, en Normandie.

 Eh oui, il est laid ! Il fera même rajouter sur son blason une devise personnelle: « Le courage donne ce que la beauté refuse ». Il sait qu’il n’est aimé des femmes que pour son rang dans la société et non pour sa beauté.

Premier mariage avec Tiphaine Raguenel

Qui est, donc, cette femme si belle et si intelligente ?

Elle est la fille de Robin III Raguenel, seigneur de Châteauloger, héros du combat des Trente et de Jeanne de Dinan-Poudrouve, vicomtesse de La Bellière. La maison familiale est située à 40 kilomètres de Broons, ville natale de Bertrand. La légende fait de leur union un exemple d’amour courtois entre une femme aussi belle, cultivée et fidèle que son mari était laid, illettré et absent.

Tiphaine dans sa jeunesse était surnommée Tiphaine la Fée. Elle était savante en médecine et en astrologie. En 1357, elle aurait prédit à Bertrand Du Guesclin au moins 2 victoires au combat. Et pourtant Bertrand n’aime pas les femmes car elles ne sont avec lui sûrement pas pour sa beauté, mais pour son courage, sa force et bientôt sa renommée. Il aurait dit des femmes à son écuyer selon Froissart : «  Va-t’en, imbécile ; tu es bien naïf ; il faut être bête pour se fier à une femme. Elles n’ont pas plus de sens qu’une brebis. »

Tiphaine n’est pas une inconnue au Moyen Age. Il semblerait qu’elle avait acquise une grande réputation du moins à Dinan. Il est logique qu’ils se soient rencontrés dans cette ville. Dinan est aussi le fief de Bertrand. Cependant, même s’ils sont issus du même milieu social, tout les sépare en particulier en culture. Elle est attirante et instruite. Lui est illettré et laid.

 

Froissart pense qu’il se sont connus au moins en 1357 lors du combat singulier contre Thomas de Cantorbury lors d’une trêve pendant la guerre de succession des ducs de Bretagne. En effet, l’anglais a fait prisonnier Olivier, le frère de Bertrand, en sortant de la garnison de Dinan en état de siège. Pour venger cette arrestation illégitime, il le provoque en duel devant le duc de Lancastre. Celui-ci après avoir arrêté le duel, avant que Bertrand lui enfonça sa dague dans la gorge, l’invita à boire un verre de vin et lui présenta la belle Tiphaine. Mais ce n’est pas une fille facile à marier. Elle aurait déjà repoussé plusieurs prétendants de la région d’après Cuvelier. Elle était plus attachée à l’astrologie, science en vogue à cette époque, qu’aux batifolages.

En effet, même le dauphin devenu le roi Charles V aimait cette science comme élue et singulière. Quant à Bertrand, il n’y croyait guère. Pourtant, le roi aurait donné le nom d’un astrologue spécialiste en horoscope à Bertrand quand il le nomma connétable. Mais les sentiments de Bertrand envers l’astrologie ne sont pas clairs. Dans son entourage, chacun avait son astrologue. Du Guesclin aurait eu le sien.

Mais pour l’heure, Tiphaine lui aurait dressé un calendrier des jours fastes et néfastes pour se battre. Elle lui aurait dit :  « Monseigneur, sachez que je prie de croire mon conseil, où vous ferez folie. » Il n’y croyait guère et considérait cela comme tromperie. Et pourtant, elle avait prévu sa défaite et son emprisonnement à la bataille d’Auray.

Toujours est-il qu’il se maria avec Tiphaine, en 1363, non par amour mais sûrement par convenance. Charles de Blois aurait favorisé leur union. Tous deux avaient passé l’âge de la quarantaine. Il ne resta auprès d’elle que quelques semaines. En effet, Bertrand fatigué du service voulut rentrer dans ses terres. Tiphaine, l’astrologue, lui prédit une brillante carrière auprès du roi de France et le renvoya aux combats. Il repartit sans mot dire. Il aura un commandement d’une bataille à Auray au cours de laquelle il sera fait prisonnier. De chef de bande, il passera chef de guerre. Son avenir sera tracé grâce à l’intervention de son épouse.

Elle vécut dans le château de la Roche-Derrien de Bertrand Du Guesclin, donné par Charles de Blois en remerciement des bons et loyaux services. Elle habita aussi au Mont Saint-Michel dans un logis ( propriété actuelle de Philippe, marquis de Saint-Gilles). Il est possible qu’elle eut vécu aussi à la maison du gouverneur au Mont Saint Michel, du fait du titre de Bertrand de capitaine du royaume de France. En effet, le dauphin Charles lui octroya une rente annuelle de 200 livres et le nomma capitaine général de Pontorson, du Mont St Michel et le manoir de Sacey (Sud Manche). pour la Normandie.

L’anecdote, qui suit, montre bien que Tiphaine Raguenel était une femme de haut lignage digne d’une grande reine. Son esprit cultivé lui donnait une supériorité sur beaucoup de prud’hommes dans les conseils.

Bertrand est fait prisonnier à la bataille de Najera en Castille en avril 1367. Mauléon, son écuyer, rapporta la nouvelle à Tiphaine Raguenel. Il venait aussi récupérer les 100 000 écus d’or qu’il avait ramenés de ses campagnes pour sa rançon.

Parlez, sire chevalier, dit-elle, je sais que vous m’apportez de bien mauvaises nouvelles de mon époux, parlez !

Elle pâlissait au fur et à mesure de ses explications. Le ton s’assombrissait.

– Vous venez de la part de mon époux, sire chevalier ?

– Oui, dame, répliqua Mauléon,

Il est prisonnier en Castille et sera mis à rançon ? Répliqua-t-elle

Oui, il s’est mis lui même à rançon à 70 000 florins d’or

Ce n’est pas exagéré pour un si grand capitaine. Il les attend de qui ces 70 000 florins d’or ?

– De vous, Dame

– De moi ?

– Oui, vous avez 100 000 écus d’or de ses dernières expéditions confiés aux religieux du Mont St Michel.

Cette somme est dissipée

– Dissipée ! s’étonna le chevalier

– En effet, j’ai pris les 100 000 écus d’or et je les ai distribués pour équiper 120 gens d’armes, secourir 12 chevaliers de notre pays, élever 9 orphelins de nos gens morts à la guerre, et pour marier les 2 filles de nos voisins j’ai engagé ma vaisselle et mes joyaux. Comment voulez-vous faire vivre tout ce monde sans argent. Je suis certaine que mon époux aurait apprécié et me remercierait s’il était là.

Avant de partir récolter l’argent pour son illustre seigneur, le chevalier baisa avec beaucoup de respect la main de Dame Raguenel et s’en alla.

Tiphaine avait pris avec beaucoup d’humilité et d’abnégation son rôle d’épouse d’un grand chef de guerre reconnu par ses amis mais aussi par ses ennemis.

Tiphaine Raguenel mourut en 1373 sans enfant.

Deuxième mariage avec Jeanne de Laval-Tinteniac

Entourage de Bertrand de son simple ami, au roi regrettent qu’il n’y ait pas eu de descendance entre ces deux belles personnes, entre les vertus d’une mère et les valeurs d’un père. Maintenant, il faut perpétrer le nom, le mérite et la réputation de l’homme.

Tous s’emploient à lui trouver une femme digne de lui. Leurs yeux se jettent sur Jeanne de Laval. Elle est fille de Jean Laval, Seigneur de Châtillon et d’Isabelle, Dame de Tinteniac.

De son père, elle est héritière de Châtillon, d’Aubigné, Courbeveille, de sa mère, elle est héritière de Tinteniac, de Bécherel et de Romillé, Elle possédait aussi Meslay, Montsûrs, Olivet, Bouère, dans la baronnie de Laval, et plusieurs autres lieux en Bretagne.

Il l’épouse en janvier 1374 à Rennes. La fête est faite en grande pompe avec l’éclat convenable à la dignité de l’homme et la haute naissance de la femme. A la cérémonie, sont présents des grands seigneurs bretons comme Pierre de Villiers, Hervé de Mauny, Sire de Thorigné, Guy de Laval, et bien d’autres notables. Dans la dote, il lui donne le tiers de ses terres bretonnes, le comté de Longueville ( 76) . Le tout à vie. Elle amène à Bertrand, les terres de Montmuran et le château de Tinteniac avec le titre de Seigneur.

Maîtresse reconnue par les chroniqueurs : La dame de Soria

Lors de la première expédition en Castille 1365 – 1367, Bertrand du Guesclin met temporairement Henri Transtamare sur le trône de Castille. Pour le remercier, il lui fait don du comté de Borjà, entre Soria et Saragosse. A la cour du roi, il rencontre Dame de Soria appartenant à l’une des plus anciennes familles de Castille. Il aurait eu avec elle, deux garçons : un, ancêtre des marquis de Fuentes et un, parmi ses descendants, archevêque de Burgos.

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