Bertrand DU GUESCLIN « Le dogue noir de Brocéliande »
Bertrand Du Guesclin est maintenant âgé de 20 ans quand la guerre de succession de Bretagne éclate. Elle durera 23 ans de 1341 à 1364, année de la mort de Charles de Blois à la bataille d’Auray.
Il est toujours chez son oncle à Rennes. A la veille du conflit chacun doit prendre position soit pour Charles de Blois, allié du roi de France soit pour Jean III de Montfort, allié des anglais.
La petite noblesse bretonne et la bourgeoisie portuaire de la côte ouest de la Bretagne se rangent du côté de Jean III De Montfort.
La grande noblesse bretonne et la bourgeoisie des villes orientales prennent parti pour Charles de Blois.
Ainsi, le clan des Du Guesclin rallie la cause de Charles de Blois. En effet, ils ont des terres en Bretagne orientale mais aussi en Normandie, en sud Manche.
Jean de Montfort est peu connu dans cette partie de la Bretagne. Bertrand Du Guesclin embrassera cette cause. De plus, sa mère est d’origine de Sacey, canton de Pontorson appartenant au domaine royal de France.
Bertrand Du Guesclin, par son tempérament, restera fidèle au parti des Blois même après la mort de Charles de Blois à la bataille d‘Auray. Par cet engagement il aura toute la confiance et la fidélité de ses chefs. Il ne se remettra jamais en question.
Par son choix, de 1341 à 1353, il entrera dans la clandestinité dans les rangs de Charles de Blois. Il harcèlera les forces de Jean de Montfort mais surtout des anglais quand ils entreront en Bretagne en 1345. Il participera à la défense de Rennes face aux anglais. Puis, il deviendra un petit chef de bande menant des guérillas dans les forêts autour de Rennes tel le Robin des Bois de la forêt de Sherwood.
En 1347, les anglais s’emparent de quelques places fortes autour de Rennes et en particulier le château de Fougeray qui donnera à Bertrand une autre dimension. En effet, son centre d’action est l’antique forêt de Brocéliande près de Paimpont. Elle est pleine de souvenirs de Merlin l’Enchanteur et du roi Arthur.
Merlin conseillant Arthur, illustration de Gustave Doré pour Idylles du roi de Lord Alfred Tennyson, 1868.
Par ses coups de mains, embuscades et guets-apens, il entretient l’insécurité dans les garnisons anglaises. Il finit par se tailler une solide réputation de chef de bande. Il sera surnommé « Le Dogue de Brocéliande »
Ses compagnons d’armes appartiennent à la petite noblesse et la paysannerie. Ceux sont de rudes gaillards. La bande se monte à 50 ou 60 hommes. Ils sont tous aguerris au combat et au corps à corps. Ils vont le prouver.
Je vous parlais précédemment du château de Fougeray. Ce sera son premier authentique exploit : la prise du château.
Nous sommes en 1350.
Il est tenu par les anglais commandés par Robert Bamborough. Cet ouvrage est imprenable par la force. Il possède 9 tours et de solides remparts dotés de mâchicoulis et de créneaux avec une seule entrée par un pont-levis.
Tour du Guesclin, château de Grand-Fougeray vu du côté ouest.
Du Guesclin surveille les allées et venues des anglais. Un jour, il apprend par un valet que le gros des troupes de la garnison a quitté le château pour soutenir un autre capitaine, Thomas Dagworth dans la région de Vannes. Il ne reste que quelques soldats, le personnel de cuisine et d’écurie.
Bertrand expose son plan d’attaque à ses hommes. Déguisés en bûcheron et en femme, une trentaine d’hommes bloquera, avec des bûches, l’entrée du pont levis abaissé. Le reste de la troupe, caché à l’orée du bois leur viendra en aide dès l’alerte donnée. L’idée est bonne mais audacieuse. Malgré leur grande confiance, ils sont méfiants. Il leur promet butin et vin à volonté. Finalement, tous acceptent.
L’affaire ressemble plus à du brigandage qu’à un haut fait d’armes mais enfin seul le résultat compte !!
Les premiers se déguisent dont Bertrand. Il arrive au pont-levis et crie à la sentinelle: « Holà! holà! sentinelle, j’apporte du bois pour les cuisines du château. » Le garde, en confiance, baisse le pont levis et ouvre un battant du portail. Prenant leurs armes cachées dans la charrette de bois, ils se ruent dans la cour, Du Guesclin avec son épée fend le crâne du garde et crie :
« Guesclin en avant, les amis en avant ! et de continuer. Fils de putain, voilà du bois que vous paierez cher »
La petite garnison est vite massacrée mais le personnel sort des cuisines armé de couteaux, de broches et pilons. Bertrand est vite submergé. Les renforts tardent à venir. Il est enragé, plein d’agressivité, de sueur et de sang. Il se trouve au milieu d’une vingtaine d’entre eux.
Les renforts arrivent. Tout est terminé.
Comme il sait qu’il ne pourra pas tenir face au retour de la troupe, il pille le château et s’en retourne dans sa forêt de Brocéliande.
L’affaire du château de Fougeray fit grand bruit dans les rangs anglais. Même cet événement arriva aux oreilles du duc de Lancastre, chef des armées anglaises en Bretagne. Jean II Le Bon, le nouveau roi de France fut mis au courant de cette affaire par Charles de Blois.
La renommée de Du Guesclin commençait à se répandre. C’est vraisemblablement vers 1353 que Du Guesclin entre au service du Roi de France dans l’armée du maréchal Arnoul d’Audrehem.……..