LA BATAILLE DE FORMIGNY LE 15 AVRIL 1450

LA BATAILLE DE FORMIGNY LE 15 AVRIL 1450

 

    La prise du pont de Pont-de-l’Arche en 1449 par les troupes de Charles VII réveilla un homme prudent et adroit politiquement. Il décida de passer à l’offensive en Normandie. Rouen, Honfleur et Harfleur furent prises par Charles VII. Au fur à mesure qu’il avançait vers le Cotentin, toutes les places fortes tombaient une à une.

    Mais l’Angleterre voyant le péril en Normandie, Marguerite d’Anjou, femme de Henri VI, et le marquis de Suffolk, qui gouvernaient au nom du roi, envoyèrent un renfort de 6 000 hommes, commandé par Thomas Kyriell1. Il débarqua à Cherbourg. Il chercha à rejoindre le duc de Somerset à Bayeux, en prenant le chemin du littoral.

 

   En effet, le duc dut accepter les conditions de Charles VII au siège de Rouen en octobre 1449 et se replia sur Bayeux. Kyriell décida de passer par les grèves de Grand-Vey2 et rejoignit le Bessin au lieu de traverser par les marais immergés de Carentan sous la menace des marées montantes. Malgré l’attaque des troupes françaises du comte de Clermont3, Jean II de Bourbon, avec les habitants de Carentan et ceux des villages voisins, Kyriell passa sans encombre les grèves et marcha sur Bayeux. Il s’arrêta dans les environs de Formigny pour y passer la nuit.

La bataille de Formigny le 15 avril 1450

   Averti de l’emplacement du campement anglais, le comte de Clermont s’installa à Carentan, la nuit du 14 avril 1450, avec son armée de 3 000 gens d’armes. Il envoya un messager pour prévenir Arthur III, comte de Richemont et connétable de France, de le prier de marcher sur Trévières, au sud de Formigny, alors que lui attaquera les Anglais. Le connétable avait, avec lui, entre 1 500 et 1 800 hommes. Au petit matin du 15 avril, le comte de Clermont n’attendit pas les troupes de Richemont et s’avança vers Formigny. Du haut d’une colline en pente douce, il vit les 6 000 Anglais rangés pour la bataille.

    Kyriell avait organisé son armée en deux corps. Il commandait le premier, le plus important, adossé au village de Formigny. Mathieu Goth, un de ses lieutenants et gouverneur de Bayeux, dirigeait l’autre, près du ruisseau et du pont. Avertis des renforts de Richemont, les Anglais renforcent leur position au moyen de fossés, de retranchements et d’épieux. Dans le village, Kyriell était protégé par les maisons, les murs, les haies, les jardins plantés d’arbres et le pont protégé par des gardes anglais. Le jeune comte, impatient de combattre, n’attendit pas l’arrivée du comte de Richemont. Il s’avança face à l’armée anglaise de Mathieu Goth, à trois traits d’arbalètes. Il commanda à une partie de ses cavaliers, les archers, de mettre pied à terre. Il plaça 50 ou 60 lances et ses couleuvrines pour occuper les Anglais qui couvraient le bord de la rivière et pour préparer sa liaison avec le connétable. Les tirs de boulets causaient de grands dégâts dans les rangs de Mathieu Goth. Pour mettre fin à cette situation, il lança contre les Français 5 à 600 archers qui traversèrent le pont et les chargèrent. Ceux-ci furent repoussés et les couleuvrines, saisies. Pierre de Brézé avec ses hommes renforça les archers français qui perdaient pied. Il s’engagea, alors, un corps à corps furieux. Mathieu Goth en difficulté espérait des renforts de Kyriell qui ne vinrent pas, car il attendait, de son côté, les Bretons du connétable.

    Sans nouvelles de son neveu, le comte de Clermont, le connétable de France se hâte de le rejoindre. Il envoya, en éclaireur, le bâtard de la Trémoille avec 15 ou 20 lances. Il disposa son armée pour marcher. L’avant-garde était commandée par le maréchal de Lohéac4, Jacques de Luxembourg et le sir de Boussac5. Au centre, marchaient Gilles de Saint-Simon6, Jean et Philippe de Malestroit avec les archers. Le comte de Richemont et Jean Bude, son porte-étendard, et plusieurs seigneurs fermaient le convoi avec les cavaliers bretons. Quand il arriva sur les hauteurs de Formigny, cela faisait trois heures que l’on combattait. Les Français commençaient à faiblir.

Le comte de Clermont et le comte de Richemont

   Les Anglais, croyant l’arrivée des renforts de Somerset de Bayeux, furent d’abord enthousiastes. Au fur et à mesure que cette armée avançait, des lys des rois de France apparaissaient sur les enseignes. Effrayés, les Anglais reculèrent vers le pont. Pierre de Brézé en profita pour reprendre les couleuvrines. Les Bretons attaquèrent les Anglais près du pont après avoir franchi un guet en amont. Apeurés, ils fuirent vers leur campement. Le pont fut pris. Toutes les troupes du connétable le traversèrent et rejoignirent le comte de Clermont en difficulté. Les Anglais furent attaqués de toutes parts, à droite par Pierre de Brézé, et au centre et à gauche par le comte de Richemont et son neveu. Culbutés par Brézé, les Anglais se dispersèrent. Kyriell tenta de résister, mais pris de tous les côtés, il s’enfuit avec sa troupe.

La bataille fut gagnée par les Français le 15 avril 1450. La rivière était rouge par le sang. Les Anglais de Kyriell fuirent vers Bayeux et Caen. Ceux du campement résistèrent un instant et furent tous massacrés par les Bretons. Les paysans accoururent et s’emparèrent de tous leurs biens et tuèrent les fuyards.

Après la bataille de Formigny, les Français investirent Caen qui se rendit sans difficulté puis Bayeux. La Normandie était libérée de toutes les troupes anglaises. Le duc de Somerset fut prié, après le siège de Caen, de rejoindre Calais puis traversa la Manche et rentra en Angleterre.

Source :

Le connétable de Richemont « (Arthur de Bretagne) » 1393-1458 – page 404 Eugène Cosneau · 1886

1(1396 – 1461) capitaine anglais et chevalier-banneret de la guerre de Cent Ans et de l’ouverture de la guerre des Deux-Roses. Il fut ouvertement un commandant de la maison d’York en 1460. Il se trouva dans le camp des perdants et fut capturé alors qu’il gardait le roi, Henri VI, qui était prisonnier des Yorkistes. Marguerite d’Anjou fit prononcer à Édouard de Westminster, prince de Galles, le sort de la garde Yorkiste et il fut décapité.

2La baie des Veys était autrefois un lieu de passage très fréquenté, qui permettait de joindre à pied la Manche et le Calvados, en évitant les marais de Carentan.

3(1426 – 1488) fils de Charles Ier, duc de Bourbon, est comte de Clermont à partir de 1427 et devient duc de Bourbon en 1456. Sous le règne de Charles VII, il participe aux derniers épisodes de la guerre de Cent Ans aux côtés de Jean de Dunois, la reconquête de la Normandie et la conquête de la Guyenne, notamment de Bordeaux, devenant gouverneur de Guyenne en 1453.

4 André de Montfort-Laval (1408 – 1486), dit André de Lohéac, seigneur de Lohéac et de Montjean, puis baron de Retz (du chef de sa femme Marie de Rais, fille de Gilles de Rais), amiral puis maréchal de France,

5Jean de Brosse (1375 – 1433), seigneur de Boussac, Sainte-Sevère (Indre) et Huriel (Allier), maréchal de France et compagnon d’armes de Jeanne d’Arc.

6Saint-Simon (Gilles de Rouvroy, sire de), capitaine français, mort vers 1478. Après avoir pris part aux sièges de Meaux, de Creil, de Pontoise, au combat de Formigny (1450), etc., il reçut le commandement des gendarmes et des archers et devint en 1465 un des seigneurs préposés spécialement à la garde de Paris.

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