LE SIÈGE DE MONTARGIS 1427
Ce siège est peu connu sauf, peut-être, par les initiés. Montargois et Montargoise ! Quand vous emprunterez l’avenue Gaillardin (en face de la gendarmerie), vous la traverserez différemment après avoir lu ou écouté cette publication.
La hardiesse et l’audace de ses habitants, pour libérer leur ville, font pâle figure devant les exploits répétés de Jeanne d’Arc et de ses capitaines au siège d’Orléans, à la bataille de Jargeau, de Meung-sur-Loire, de Beaugency, Patay et bien d’autres, deux ans plus tard.
Cet acte, pourtant, héroïque restera longtemps dans l’oubli. La victoire de ses habitants sur l’ennemi anglais déstabilisa le dauphin Charles qui hésitait à affronter la triple alliance du traité d’Amiens. Cet évènement déclenchera chez lui la volonté de changer les choses, avec l’aide de son nouvel allié, le duc de Bretagne. La « Reconquête » de la France est en marche .
Les Anglais qui veulent occuper toute la Loire décident de jeter leur dévolu sur la place forte de Montargis du roi de Bourges. En effet, ils désirent faire de cette ville, un grand quartier général qui surveillerait toute la Loire. Jean de Lancastre, Ier duc de Bedford et régent du royaume de France pour le roi d’Angleterre, envoie six mille hommes commandés par des chefs aguerris comme Richard de Beauchamp, 13e comte de Warwick, William de la Pole, 1er duc de Suffolk et son frère, les premiers jours de juillet 1427.
De leur côté, avec la reprise de la guerre entre Anglais et Français, le maire et son conseil ordonnèrent, dès 1418, à la suite du passage du roi Charles VI, de renforcer les remparts de la ville. 1427, à l’approche des Anglais, le gouverneur, Bouzon de la Faille, conforte leur surveillance par une forte milice et placent des bombardes et des pierriers de tous les côtés. Il jure devant les habitants de ne rien céder à l’ennemi.
Montargis en 1427
Pour investir la ville, Warwick établit son quartier général au couvent des Dominicaines (en bas), Suffolk campe à peu près à la même place que l’hôtel de ville actuel (à gauche) et de la Pole au sud-ouest du château (en haut). Plusieurs assauts répétés sont vains. Montargis résiste. Le siège en est à son deuxième mois. Les Anglais sont bien approvisionnés, mais les assiégés commencent à manquer de tout. Tous les méandres du Loing, rivière qui passe près de la forteresse, sont contrôlés par les Anglais. Plus aucun ravitaillement ne passe. Tous les messagers, envoyés à Bourges par le gouverneur pour demander de l’aide au dauphin, sont arrêtés et jetés en prison. Néanmoins, la lutte est toujours aussi acharnée.
Un jour, pendant le siège, un messager de la ville emprisonné et corrompu, propose aux Anglais d’entrer en ville, sans coup férir, grâce à son frère, gardien de la porte principale. Fatigué des assauts aux murailles, sans résultat, Warwick accepte la proposition. Mais, le gouverneur de la ville, mis au courant du stratagème, prend des dispositions pour empêcher cette incursion ennemie. Au milieu de la nuit, Simon Morhier, prévôt de Paris pour le roi d’Angleterre, et quelques hommes montent à l’échelle après un signal lumineux des remparts. Au fur et à mesure qu’ils grimpent, arrivés en haut, ils sont capturés sans brutalité. Quand tous sont faits prisonniers, les assiégeants se mettent à rire à tue-tête et ridiculisent les Anglais qui attendent, armés, pour entrer dans la ville.
Cependant, mourant de faim, sans munition et sans bois pour faire chauffer les quelques vivres restants, les assiégés désespèrent de voir venir les renforts. Leur moral est au plus bas. Charles est mis au courant de la résistance des Montargois face aux Anglais qui les assiègent.
Aussitôt, il dépêche le connétable de France, Arthur de Richemont, avec ses troupes et un convoi de ravitaillement. Aidé de ses capitaines comme La Hire, Poton de Xaintrailles, Jean de Dunois et bien d’autres, le connétable avec 1 500 lances et de nombreux piétons prennent la direction de Mehun, traversent la Loire à Gien et arrivent en vue de Montargis. Le 2 septembre 1427, après un bref repos, La Hire, en avant-garde, repère les emplacements de ses ennemis. Puis, il fond sur eux avec une extrême vigueur. Il est midi et la chaleur est accablante. Aucun Anglais ne s’attend à une attaque. La surprise est à son comble. Le désordre règne maintenant dans les rangs. Les assiégeants, voyant les renforts français, sortent de la ville et chargent leur ennemi par l’arrière. Pris entre deux feux, les Anglais fuient tous ensemble par le pont qui enjambe le Loing. Mais, celui-ci s’effondre à leur passage. Beaucoup se noient. Warwick, Suffolk et de la Pole avec le reste de leur armée se retirent, passent par Nemours et rejoignent Paris.
Plusieurs faits héroïques de citoyens de Montargis ont permis la victoire de l’armée française. Premièrement, Gaillardin. Pendant la bataille, il s’empare de l’étendard de Warwick qu’il portera pendant plusieurs années lors des cérémonies fêtant la victoire.
Puis, deux habitants aidés par des paysans détruisent des retenues d’eau en amont de la ville qui noient le camp anglais, et enfin, l’abbé de Cercanceaux qui, à la tête de ses troupes, se sert d’une masse en fer pour assommer ses adversaires, car sa religion l’empêche de faire couler le sang.
Cette bonne nouvelle traverse la France après les défaites cuisantes de Verneuil-sur-Avre en 1424 et Cravant en 1423. Charles, le dauphin, comble de grâces et de privilèges la ville pour cette victoire. Il l’autorise à s’appeler Montargis-le-Franc et à porter sur leurs armoiries trois fleurs de lys d’or, avec les lettres M ( Montargis) en haut, L.F. en pointe ( Le Franc).
Ces privilèges furent conservés et successivement augmentés par Louis XI, Charles VIII, Louis XII et les rois suivants, et ce, jusqu’à Louis XVI en 1784.
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