LE COMBAT DES TRENTE, LE 26 OU 27 SEPTEMBRE 1351

LE COMBAT DES TRENTE, LE 26 OU 27 SEPTEMBRE 1351

Un combat héroïque et vertueux pendant la guerre de Cent Ans, le combat des trente, comme au temps de la Rome Antique, les Horaces contre les Curiaces. En effet, trois de Rome contre trois d’Albe-la-Longue décidèrent de régler une guerre entre les deux villes lors d’un duel héroïque d’après la tradition rapportée par Tite-Live entre 673 et 641 avant Jésus-Christ. En 1351, le combat des Trente s’est déroulé de la même manière, mais cette fois-ci ils sont trente contre trente.

Avant d’expliquer ce fait héroïque breton, rappelons-nous le contexte.

1341, Jean III le Bon, duc de Bretagne mort sans postérité. Son frère, Guy de Penthièvre, mort en 1331, a une fille Jeanne de Penthièvre. Le duc avant de mourir la choisit comme l’héritière du duché. Mais son demi-frère, Jean de Montfort, ne l’entend pas de cette oreille et revendique le trône des ducs de Bretagne. Commence « la guerre de succession des ducs de Bretagne » ou «  la guerre des deux Jeanne ». Les Montfort s’allient aux Anglais et les Penthièvre par le mariage de Jeanne de Penthièvre avec Charles de Blois-Châtillon, neveu de Philippe VI de Valois, roi de France, s’allient aux Français. Les bases d’un conflit, qui dura 23 ans, sont posées.

Revenons à notre combat des Trente. En 1348 est signée une trêve entre les rois de France et d’Angleterre. Donc, pas de combat, pas de bataille ou pas d’armes.

En septembre 1351, malgré la trêve, Richard Bamberough, anglais, capitaine de la garnison de Ploërmel ravage et pille, la région jusqu’aux limites du camp blésiste de Josselin ( parti de Charles de Blois ). Il fait des prisonniers qu’il enchaîne et ramène à Ploërmel pour demander des rançons. Ce sont des marchands, des métayers ou des cultivateurs. Outré par ces excès, Jean IV de Beaumanoir, capitaine de la garnison de Josselin rencontre Bamberough et lui dit :

— Chevalier, tu te rends bien coupable de tourmenter ces pauvres gens qui sèment le blé, nourrissent le bétail et défrichent les terres pour nous nourrir. Le brave n’attaque pas l’homme sans défense. Laisse en repos le laboureur et venge-toi dignement sur un combattant. Je te propose que trente de tes plus vaillants chevaliers rencontrent trente des miens.

Je suis d’accord, rencontrons-nous au « chêne de Mi-Voie » dans la plaine entre Josselin et Ploërmel. »

Le jour est fixé. Ce sera le 27 septembre ( on pense aussi le 26 ).

Le matin, les Anglais arrivent sur le lieu du combat. Ils portent épées, dagues, haches, maillets et lances. Ils sont vêtus d’une cotte de mailles recouverte de lames de fer et d’un bassinet sur la tête. Bamberough encourage ses hommes par une prophétie de Merlin qui promet la victoire.

Les Français, commandés par Beaumanoir, après avoir communié à Josselin, arrivent à leur tour, bien armés et fortement vêtus.

Les juges écartent de la lice les badauds venus regarder le combat. Les Français s’alignent d’un côté et les Anglais de l’autre. Puis, le héraut dit haute voix : « Laisser aller »

Le premier choc est funeste aux Bretons. Even Charruel est fait prisonnier. Geoffroy Poulard et Geoffroy de Mellon meurent. Tristan de Pestivien, Caro de Bodéga et Jean Rouxelot sont gravement blessés. La bataille continue jusqu’à épuisement. Puis, tous décident d’une suspension du combat pour se désaltérer et reprendre des forces. On se félicite, on se congratule et on raille sur ses ennemis, mais on boit un bon vin d’Anjou tous ensemble.

L’alcool faisant son chemin, on reprend des forces. Geoffroy de la Roche, un des écuyers de Beaumanoir, demande qu’il l’adoube, chevalier. Chose faite, maintenant il est animé d’une ardeur débordante. Il invite ses confrères ( il en reste 25 ) à poursuivre le combat. Il provoque les Anglais. Tous se remettent en ligne et reprennent l’affrontement plus terrible que jamais.

La victoire change de camp. Bamberough, capitaine des Anglais, est atteint d’un coup de lance dans le visage. Blessé, il se ressaisit, mais reçoit un ultime coup de dague dans le ventre par Geoffroy du Bois. Désarçonné, il tombe à terre, mort. Les Anglais sont désemparés. Ils n’ont plus de chef. Un écuyer allemand nommé Croquart reprend le flambeau et remotive les troupes de feu Bamberough :

N’écoutez pas les prophéties de Merlin, compagnons ! le remède est de se serrer étroitement et de tenir ferme. Que quiconque s’approche de nous tombe mort ou blessé.

Le combat reprend. Plusieurs sont tués. Mais, Beaumanoir, chef de file des Franco-Bretons, est blessé. La perte de son sang rend sa soif ardente. Geoffroy du Bois, qui a tué Bamberough, lui dit:

Bois ton sang, Beaumanoir, la soif te passera !

Oubliant sa soif, Beaumanoir se relève et se jette de nouveau dans la mêlée.

Tous combattent avec bravoure et rage. À ce moment-là guillaume de Montauban, un Breton, enfourche son destrier et s’enfuit. Que tout le monde croit, bien sûr ! Aussitôt, il fait volte-face et se précipite sur les Anglais avec une telle force qu’il en tue sept. Désemparés, les Anglais demandent l’arrêt du combat et s’avouent vaincus. De grands capitaines anglais comme Robert Knolles et Hugues Calveley sont faits prisonniers et mis à rançon.

Fin du combat des Trente si épique et héroïque, mais qui ne changea pas la face du conflit entre Franco-Bretons et Anglo-Bretons pour la guerre de succession des ducs de Bretagne.

En effet, en 1364, Charles de Blois-Châtillon, chef des Franco-Bretons, meurt au combat à la bataille d’Auray et leur commandant, Bertrand du Guesclin, est fait prisonnier. Les Blésistes, avec en tête Jeanne de Penthièvre, sont à genou. Le clan des Monfortistes a gagné. Jean III de Montfort deviendra duc de Bretagne sous le nom de Jean IV de Bretagne.

Aujourd’hui, située dans la commune de Guillac, dans le Morbihan, la Colonne des Trente s’élève à 13 mètres de haut. Elle symbolise le Combat des Trente, combat épique qui eut lieu le 27 septembre 1351. Elle fut inaugurée le 6 juillet 1823.

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